ELIAS (N.)

ELIAS (N.)
ELIAS (N.)

ELIAS NORBERT (1897-1990)

Commencée dans le contexte de la sociologie allemande de l’entre-deux-guerres (il a travaillé avec Alfred Weber et Karl Mannheim), l’œuvre d’Elias n’eut aucun impact avant les années 1970 et 1980. Après avoir quitté l’Allemagne nazie en 1933, Elias a traversé une longue période d’isolement avant d’enseigner la sociologie à l’université de Leicester en 1954. Son intense production intellectuelle, après 1970, coïncide avec le moment où son œuvre apparaît comme une solution à l’impasse quantitativiste et fonctionnaliste où se trouve alors la sociologie. Il a aujourd’hui de nombreux disciples, particulièrement en Grande-Bretagne, en Hollande et en Allemagne.

Dans Was ist Soziologie? , 1970 (Qu’est-ce que la sociologie? ), Elias appelle à un renouvellement radical de la sociologie qui conduise à un type nouveau de scientificité, s’opposant aux principaux courants des sciences sociales des années 1960: fonctionnalisme américain mais aussi école «néo-marxiste» allemande et structuralisme français. Il dénonce le «repli sur le présent» et les «pseudo-spécialisations» d’une sociologie «menacée d’éclatement» et leur oppose, à la suite d’Auguste Comte, la nécessité de savants «voués à l’étude des généralités scientifiques» et «familiarisés avec l’exploration de processus sociaux à long terme».

Deux concepts fondamentaux guident ses recherches empiriques: celui de configuration et celui de processus. Le concept de configuration permet de dépasser l’antinomie individu-société: aux idées d’une société indépendante des individus et d’un individu-atome, clos et indépendant des autres individus, il substitue l’image de configurations concrètes que les individus forment ensemble sans jamais leur préexister et qu’on ne peut analyser sans tenir compte du «sens intentionnel» que les actions possèdent pour les actants. Dans ces configurations toujours mouvantes s’établissent des équilibres fluctuants de tensions et de forces. Elias dépasse ainsi le concept de changement social où, une fois posés deux états stables de la société, on s’épuise à imaginer pourquoi et comment la société peut passer de l’un à l’autre. À l’idée de causalité, il substitue des modèles dans lesquels évoluent ensemble, et de façon interdépendante — c’est-à-dire sous la forme d’un processus —, les phénomènes économiques, les rapports de pouvoir, les modalités de la connaissance et les contraintes sociales que les hommes exercent sur autrui et sur eux-mêmes. Il intègre dans ces modèles les avancées de ses prédécesseurs: monopolisation des moyens de production par les entrepreneurs capitalistes (Marx); monopolisation des moyens de violence par l’État (Weber); intériorisation progressive des contraintes sociales en une autocontrainte (selfrestraint , Selbstzwang ), concept très proche du surmoi (Freud).

Ses recherches des années 1930 réunies dans Über den Prozess der Zivilisation (1939) sur la psychogenèse du comportement (trad. franç., t. I: La Civilisation des mœurs ), indissociable d’une sociogenèse de l’État (trad. franç., t. II: La Dynamique de l’Occident ), mettent en évidence un «processus de civilisation» par accroissement de l’autocontrainte dans les comportements interindividuels (visible tant dans les manières de table que dans les relations sexuelles ou dans les formes de l’agressivité, guerrière ou «sportive»), processus lié à la formation de l’État. Dans Die höfische Gesellschaft , 1969 (La Société de cour ), il étudie une configuration sociale qui représente un moment clé de ce processus de civilisation à long terme: la cour de Louis XIV, où s’effectue une transformation des règles de comportement liée aux rapports de pouvoir entre les courtisans et le roi. Un de ses derniers ouvrages, Die Gesellschaft der Individuen , 1987 (La Société des individus ), analyse les conséquences sociales et culturelles du développement de l’individualisme auquel le processus en question a conduit.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Поможем написать курсовую

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Elias — ist ein männlicher Vorname, der auch als Familienname vorkommt. Inhaltsverzeichnis 1 Herkunft und Bedeutung 2 Verbreitung 3 Namenstag 4 Bekannte Namensträger …   Deutsch Wikipedia

  • Elías — Elias (Latinisierung von Ηλιας) ist als männlicher Vorname und, davon abgeleitet, als Familienname gebräuchlich. Inhaltsverzeichnis 1 Herkunft und Bedeutung 2 Varianten 3 Namenstag 4 Bekannte Namensträger 4.1 …   Deutsch Wikipedia

  • Elías — Saltar a navegación, búsqueda Para otros usos de este término, véase Elías (desambiguación). Elías …   Wikipedia Español

  • Eliáš — ist der Familienname folgender Personen: Alois Eliáš (1890–1942), tschechischer General und Politiker, Ministerpräsident des Reichsprotektorats Böhmen und Mähren Patrik Eliáš (* 1976), tschechischer Eishockeyspieler …   Deutsch Wikipedia

  • Elias — [ē lī′əs, ilī′es] n. [L < Gr Elias < Heb: see ELIJAH] var. of ELIJAH …   English World dictionary

  • Elīas — (hebräischer Name, so v.w. Jehovah ist mein Gott); I. biblische Person: 1) E., Prophet in Israel, aus Thisbe in Galiläa, unter den Königen Ahab u. Ahasja, 919–896 v. Chr.; wegen seines Eifers für die Religion der Väter u. seines rückhaltslosen… …   Pierer's Universal-Lexikon

  • Elias — (spr. ilāīas), Ney, engl. Reisender, geb. 10. Febr. 1844 in Kent, gest. 31. Mai 1897 in London, kam 1868 als Kaufmann nach Ostasien, nahm 1868 den Unterlauf des Huangho auf, zog 1872–73 durch die Wüste Gobi und die westliche Mongolei nach… …   Meyers Großes Konversations-Lexikon

  • Elīas — (griechische Form des hebr. Elija, Elijahu), Prophet im Reich Israel unter Ahab (s. d.) und Ahasja, aus Thisbe in Galiläa, eiferte begeistert und begeisternd mit »Feuer und Schwert« für den Monotheismus, als der Dienst des Baals und der Astarte… …   Meyers Großes Konversations-Lexikon

  • Elias — Elīas (hebr. Elija, »Jehova ist mein Gott«), Prophet im Reiche Israel, unter Ahab und Isebel (um 900 850), bekämpfte den Baalsdienst, fuhr nach 2 Kön. 2, 11 in einem Wetter gen Himmel …   Kleines Konversations-Lexikon

  • Elias — Elias, der Prophet, von seinem Geburtsorte Thisbe der Thisbite genannt, trat seit 912 v. Chr. dem üppigen Hofleben des Achab und der Sidonierin Jesabel und ihrer Nachfolger, welche den Dienst Jehovas durch den des Baal u. der Unzuchtsgöttin… …   Herders Conversations-Lexikon

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”